L’innovation : un processus itératif et transformationnel !
L’innovation est comme la vertu : Tout le monde en parle mais on dénombre peu de beaux exemples de mise en application. De grandes entreprises se sont effacées parce qu’elles n’ont pas su innover, se mettre en état de veille et instaurer le « change as usual ». Ce n’est pas tout d’être des champions de l’efficience opérationnelle, encore faut-il être en mesure d’anticiper le vent de changements qui, tôt ou tard, souffle sur toutes les entreprises, grandes ou petites. L’obsolescence est rapide et parfois sournoise !
Comme entrepreneur, il importe de bien évaluer toutes ses options. Bien que l’on soit porté à se tourner d’entrée de jeu vers les VCs, il faut savoir que ceux-ci ne financent qu’une minorité (autour de 5%) des projets innovants. Ce ne sont pas toutes les entreprises qui ont le profil risque-rendement requis pour être dans leur mire. Beaucoup d’entrepreneurs perdront un temps fou à essayer de convaincre un investisseur en capital de risque et n’auront pas de succès, tout simplement parce que leur entreprise n’a pas les caractéristiques que celui-ci recherche.
D’autres entrepreneurs qui, de prime abord, ont plus d’atouts dans leur jeu pour satisfaire les VCs n’auront pas de succès pour de multiples raisons :
- Parce qu’ils communiquent mal leur message (i.e. pitch déficient; propos éparpillés). Les VCs lisent des centaines de plans d’affaires et ne sont jamais sûrs si ceux-ci sont écrits par les entrepreneurs eux-mêmes ou des consultants. Le moment de vérité demeure quand l’entrepreneur est face à eux pour le moment de vérité : le pitch. C’est pourquoi certains demanderont d’abord d’entendre ce pitch avant de lire le plan d’affaires.
- Parce qu’ils ont un comportement inapproprié et agissent bien souvent comme s’ils étaient « the smartest guys in the room ». Lorsque l’on demande aux VCs de premier quartile de pondérer les facteurs clefs d’investissement, l’équipe vient toujours au premier plan. Certaines entrepreneurs souffrent malheureusement de dissonance cognitive sur ce plan et sont souvent mauvais juges en ce qui les regarde. Règle générale, le VC s’attardera autant à l’attitude (« soft skills ») qu’aux compétences de l’entrepreneur et de son équipe. S’il pressent que vous êtes une personnalité à problèmes – par exemple, que vous êtes « soupe-au-lait », arrogant ou, pire, non « coachable » -, il coupera court au dialogue. Le VC fuit par-dessus tout l’enlisement dans des conflits stériles.
- Parce qu’ils passent leur temps à parler de leur produit et ne font qu’effleurer les perspectives de leurs marchés (i.e. Y a-t-il une problématique ou un « pain »?; Quelle est l’ampleur de ce problème? Quelle est la taille estimée de ce marché, ainsi que sa croissance anticipée? Quelle est la proposition de valeur? …). Tous les investisseurs rechercheront un « product-market fit » fort. Une validation du marché (à un certain niveau) doit être réalisée avant le financement. En TI par exemple, un test béta peut être accompli sur un horizon court (de moins de 6 mois) et apporté un gain de valeur important pour l’entreprise.
Il ne faut pas s’attendre à ce que tous les investisseurs soient prêts à investir dans votre compagnie. Il y a bien des motifs qui demeurent indépendants de vous et qui amèneront un investisseur à ne pas investir chez vous, que ce soit la situation particulière du fonds, donc le « timing » (période d’investissement écoulée, équilibre du portefeuille, situation des entreprises en portefeuille qui peuvent avoir besoin de nouveaux investissements futurs pour lesquels des fonds sont réservés); la mauvaise expérience de l’investisseur dans votre marché ou dans un marché adjacent; ou tout simplement la dynamique interne du fonds ou de la firme d’investissement. Il y a plusieurs profils d’investisseurs et il importe de bien connaitre à qui on a affaire avant d’engager du temps et de l’énergie (i.e. une perte de focus) dans des relations certes bien intéressantes, mais qui ne permettent pas toujours d’atteindre les objectifs que l’on se fixe. En outre, comme dans toutes les industries, le monde du financement est composé de personnes qui tiennent à faire affaire avec des gens en qui ils ont confiance. Les conséquences d’un échec sont grandes et les investisseurs privilégieront les opportunités qui impliquent des gens qui ont d’ores et déjà gagné leur confiance.
Tout comme l’innovation se planifie, se teste et se structure, il en est de même pour une démarche de financement. Je suis toujours étonné de constater que nombre d’entreprises ne prennent pas le temps de réfléchir à leur avenir et qui persiste à demeurer en mode réactif et à naviguer à vue. La question que tout entrepreneur se pose est comment demeurer concurrentiel et profitable dans le monde turbulent dans lequel nous vivons. Rappelons-nous que plusieurs grandes compagnies n’ont pas su réagir assez vite et innover à temps (Blockbuster, Motorola, Kodak, RIM, Dell, …). Pour survivre à long terme, toute entreprise doit s’aligner sur les besoins et préférences de ses clients et être en constante innovation.
Il est regrettable que les principales résistances à l’innovation proviennent souvent de l’intérieur de l’organisation. Ceci est parfois lié au scepticisme du personnel à l’égard de la direction lorsque celle-ci a omis de mettre en œuvre les initiatives annoncées antérieurement (dans un plan stratégique, par exemple). Cela peut également être attribuable au fait que les personnes à qui l’on confie le chantier d’innovation n’ont pas le degré « d’ownership » nécessaire, c’est-à-dire qu’ils ne sont pas en mesure de faire toutes les connexions requises entre le processus d’innovation, le marché (les tendances et signaux qui le conditionnent) et les autres « silos » de l’organisation.
L’innovation est un processus qui implique d’avoir trois fonctions bien dynamiques dans une organisation : (1) la R&D; (2) le marketing et : (3) l’intelligence concurrentielle. Toutes ces fonctions doivent travailler en synergie parce qu’il faut, pour avoir une plateforme d’innovation efficace, continuellement repérer, valider, prioriser, tester de nouvelles opportunités. Cela prend souvent la forme d’un portefeuille d’opportunités qu’il faut suivre et tester sans relâche.